On se souvient de la démission d’un conseiller d’État neuchâtelois en 2010, près d’une année après celle de la Présidente du chef lieu du même canton. Mais depuis, ce sont des situation de non-démissions qui font la une des médias. Canton de Genève, Ville de Vevey, de Nyon, et ces derniers temps à Versoix, Perroy… Le Peuple peut-il défaire ce qu’il a fait ? Tout ceci n’est pas simple.
Élection directe
Il fut un temps qui n’est pas si éloigné que cela, où les exécutifs communaux vaudois étaient élus par le pouvoir délibérant. C’est en effet depuis 1980 que la Constitution vaudoise prend le tournant de l’élection directe des exécutifs communaux, à l’époque pour des mandants de quatre ans. La Constituante du début des années 2000 n’y trouve rien à redire et sans changer le mode d’élection, fait passer la durée des mandats à cinq ans : «Les membres de la municipalité sont élus directement par le corps électoral selon le système majoritaire à deux tours» selon l’art. 149 al. 1 de la Constitution vaudoise, dont l’alinéa 3 délègue à la loi le soin de prévoir cependant les cas et la procédure de révocation des membres de la municipalité.
Révocation indirecte
C’est l’article 139b de la loi sur les communes qui traite de la procédure de révocation. Cet article, révisé en 2012 suite à une affaire concernant un conseiller municipal montreusien, vise notamment à rendre le processus de révocation d’un membre de la municipalité «praticable» et à introduire une possibilité de révocation pour un membre du corps délibérant… Les motifs d’une révocation étaient alors mieux définis (EMPL LC in BGC Conseil d’Etat, Tome 2, 2012-2017 p. 325 ss). Comme la Cour constitutionnelle avait estimé en 2010 que la simple suspicion d’avoir commis une infraction pénale n’était pas suffisante (CCST.2009.0008 consid. 2b), le législateur de l’époque s’était limité à une suspension, cette dernière devant être prononcée par le Conseil d’État et susceptible de recours au Tribunal cantonal, ce qui est un processus «bien vaudois», où l’on fait appel à l’amour des lois dès qu’il s’agit de trancher une question politique délicate… La révocation est possible après l’échéance de la période de suspension ; elle est censée être prononcée par le corps électoral. L’on ne peut qu’imaginer l’ambiance d’une telle campagne de votation, qui n’a bien évidemment jamais eu lieu depuis que ces règles existent. Le moins que l’on puisse dire est donc que si l’élection est directe, la révocation devrait plutôt être qualifiée d’indirecte, et c’est encore un euphémisme.
Et ailleurs ?
Le sujet est en vogue. Sans toucher aux règles qui concernent les membres des exécutifs communaux (conseils administratifs), le canton de Genève connaîtra pourtant un système permettant de destituer un membre du Conseil d’État. Ce système existe déjà à Neuchâtel depuis 2014 : l’article 50a de la Constitution neuchâteloise prévoit en effet que «la loi peut prévoir la destitution des membres du Conseil d’Etat et des autorités judiciaires, de même que la dissolution du Conseil d’Etat.». Ce canton connaît également un processus équivalent de révocation de membre d’un exécutif communal par un vote de trois-quarts de l’assemblée délibérante. Et, élément intéressant, à Neuchâtel, l’art. 95 al. 4 de la Constitution cantonale prescrit que la commune décide si l’exécutif est élu par le peuple ou par le Conseil général et elle fixe le système électoral. La solution ne serait-elle pas à trouver dans le mode d’élection de l’exécutif ? C’est le choix de la Constitution fédérale où le Conseil fédéral est élu par l’Assemblée fédérale et non pas par le peuple. Mais là, aucun processus de destitution ou autre «motion de censure» n’existe.